Hier encore un grand moment à la laverie (non, toujours pas de Michael Kamen qui vient enlever son Livaïsse devant tout le monde).
Je m'installe confortablement avec un bon bouquin sur le seul banc libre (un brin trop haut d'ailleurs: j'y ai toujours l'impression d'avoir 5 ans, assis sur une digue quelconque, les pieds pataugeant dans l'eau... 5 ans c'est tout de même un petit peu vexant). J'ouvre mon roman et me laisse bercer par l'histoire plutôt bonne et le ronronnement des machines...
Puis la porte claque.
Un couple (parce qu'ils sont deux et non pas parce qu'ils dévissent la glotte) entre. Elle: la trentaine, lui la cinquantaine aviné.
Elle fonce vers les machine du fond, lui tentant autant que faire ce peut de la suivre.
- Ha mais c'est qu'il fait chaud ici!
Il y a une chose que l'écriture ne pourra malheureusement jamais retranscrire: ce sont les accents. Le sien en l'occurence atteste sans commune mesure d'un séjour prolongé en terres liégeoises (à prononcer "liéchoisse").
Je souris.
Il l'aide à sortir un plaid dont les motifs n'ont d'équivalents que dans les cadeaux de noël vestimentaires de nos parents.
Rouges comme des carrosseries de ferrarri ils poussent l'énorme duvet dans un séchoir et cherche un temps la signification précise des moults boutons présents.
Je me replonge dans mon roman quand les deux zigotos décident de prendre une option sur mon voisinage proche, à savoir le mètre libre sur mon banc. Je me pousse un peu tant en dissimulant ma joie.
J'ajoute, pour que le tableau soit tout à fait complet, que s'installe dès lors un doux parfum viticole (mais de bas de gamme) dans l'air. En clair et pour être bref, ils n'avaient pas sucé que de la glace.
Leur séant respectif au contact du bois massif, elle enquille directement sur la suite de leur palpitante conversation manifestement commencée quelques verres plus tôt Au Petit Zinc, à deux rues d'ici.
Restranscription ci-incluse, en substance:
- Mais attends Jean Yves, je n'ai rien à reprocher à Philippe. Rien. Mais bon il est un peu lavasse!
- Ho tu dis ça mais tu l'aimes bien quand même.
- C'est exactement ce que je dis: je n'ai rien à lui reprocher. Pis tu sais. Les hommes et les femmes n'ont rien en commun. Sur le plan sexuel, physique (vraiment??), de tous les jours quoi. Les mecs c'est bagnoles, football, télé et les potes. C'EST TOUT! Moi encore j'ai de la chance. Y m'emmerde pas, il boit pas et il me tape pas sur la gueule. C'est déjà bien.
Je le répète: à lire avec l'accent belge.
Jean Yves a depuis longtemps oublié toute tentative d'interruption du monologue.
- (...) un couple Jean Yves c'est fait pour marcher sur le même chemin, main dans la main (roooo c'est beau, petite larme) et s'il y a une merde, on la contourne ensemble (larme séchée!). Hein? Non parce que c'est pas à un seul des deux d'aller mettre les mains dedans.
Jean Yves, je le vois du coin de l'oeil, essaye désespérément de faire comprendre à sa collègue de zinc de baisser le volume.
- Parce que bon, avec Philippe c'est pas tout rose. Il est mou. On dit... mieux vaut être seul que mal accompagné. Mon cul! Moi je préfére être mal accompagnée que seule! Ca vient de la petite enfance je crois. Mes parents me laissaient aller seule à l'école et ça... ben quand t'es jeune ça te marque. Donc le Philippe il est pas top hein, mais c'est tout ce que j'ai. Il manque d'ambition. Toi, t'as des enfants hein?
- Oui et même...
- et voilà Jean Yves!!! VOILA! Tu les engraisses et t'y gagne quoi? pfff! que des emmerdes! remarque je dis ça mais j'ai pas d'enfants moi. Si j'en avais peut être que je dirais pas la même chose. Enfin de toute façon j'en veux pas. Donc les enfants c'est du stress. Remarque du stress à Philippe ça pourrait pas lui faire du mal. Je suis pas sa bonne et j'aimerai bien que... parce que les mecs pour aider tu peux t'accrocher. Je suis pas sa mère! tu comprends?
TIIIING!! Ouf!!! Mon sèche linge vient de finir son office. Je me lève et je vous dit pas comment je remballe le tout illico dans mon sac direction maison. En sortant, alors que Jean Yves "buvait" encore les paroles dans sa consoeur, je me suis mis à penser à ce Phillipe. Entortillé dans son plaid à motifs derrickien il ne se doute pas que tout le quartier le connait sous son petit qualificatif affectif de "lavasse".
ps: le concours de l'inconnue continue. J'ai reçu une proposition de miss L: Non ce n'est pas Angelina Jolie... point du tout. Pis comment t'as la voir sur cette photo? qu'est-ce t'avais bu?
Libellés : Au jour le jour